ZAC du Chemin Herbu (Persan, Val-d’Oise)

 

Phase 1 – 2018 – Secteurs 2D, 3, 4 et 5

La fouille préventive de la « ZAC du Chemin Herbu » a été menée de mai à août 2018 sur la commune de Persan (Val-d’Oise), située en limite septentrionale du département, en rive droite de l’Oise. L’emprise du projet de ZAC est établie sur un versant en pente douce, localisé en rive droite de l’Esches, rivière dont la confluence avec l’Oise se trouve à moins d’1,5 km au sud.
En préalable à la fouille, le diagnostic conduit par le SDAVO en 2016, concernait une surface de 47 hectares. Les tranchées réalisées avaient révélé des occupations ou indices de site allant du Paléolithique moyen jusqu’à la période gallo-romaine (Alligri 2017). À l’issue du diagnostic, sept secteurs ont fait l’objet d’une prescription de fouille du Service Régional de l’Archéologie, dont quatre centrés sur les vestiges néolithiques mis en évidence. Ce sont ces derniers qui ont fait l’objet de nos investigations en 2018, sur une surface cumulée de 2,8 hectares, livrant des vestiges allant du Néolithique ancien à l’époque contemporaine.

Les occupations domestiques du Néolithique ancien
Le Néolithique ancien est la période la mieux représentée sur le site. Les vestiges qui lui sont attribués sont localisés sur le secteur de fouille le plus proche de l’Esches, à 200 m de son cours actuel, en bordure de plaine alluviale. Ils se composent essentiellement d’alignements de fosses latérales de construction et de fosses isolées. Un arasement marqué des vestiges du Néolithique ancien a contribué à la disparition des trous de poteau matérialisant les plans de bâtiments situés entre les alignements.
Les fosses latérales identifiées sur le secteur 2D sont réparties en quatre alignements suivant un axe nord-ouest/sud-est. La distance entre ces alignements varie de 5 à 9 m, autorisant l’emplacement d’une maison. Les fosses sont de morphologie très variée et sont conservées sur une profondeur maximale de 0,70 m.
Elles ont livré une importante quantité de mobilier de nature domestique, incluant industrie lithique taillée, céramique, macro-outillage, éléments de parure, faune,…
Bien que le corpus céramique soit pauvre en éléments stylistiques datants, les observations réalisées indiquent l’existence de deux ensembles, à l’image de l’étude de l’industrie lithique. Ainsi, un premier ensemble se rapporterait à une phase de transition ou de contacts entre le RFBS et le BVSG, tandis que le second renvoie une phase ancienne de la culture de Blicquy – Villeneuve-Saint-Germain (BVSG) et d’autres à la culture Blicquy – Villeneuve-Saint-Germain sensu largo. Les datations radiocarbone s’étalent entre 5000 et 4725 avant notre ère, traduisant une évolution graduelle et phasée de l’habitat, difficile à préciser avec les données disponibles.
Les ossements de faune relèvent pour l’essentiel des bovinés, suivis par les cervidés, les suinés et les caprinés. Les éléments de macro-outillage illustrent parfaitement le caractère domestique de l’occupation par la bonne représentation des activités de mouture et de broyage, avec une majorité de meules et de molettes au sein du corpus. Quelques percuteurs et polissoirs complètent la panoplie. À ces vestiges s’ajoutent des éléments de parure relevant pour l’essentiel de bracelets en schiste, sous la forme de produits finis et de quelques préformes, dont les matériaux proviennent essentiellement du massif schisteux ardennais belge. Enfin, de nombreux fragments de torchis ont été collectés, essentiellement dans les comblements supérieurs des fosses latérales, riches en dépôts charbonneux. La présence de bâtiments est déduite de la position des alignements de fosses, de leur orientation, de leur écart et du contenu mobilier de ces structures, dont certains éléments assurent des liens entre fosses d’alignements différents.

De rares vestiges dans le secteur 3 attestent non seulement une extension de l’habitat BVSG dans cette partie de la plaine alluviale, sans pouvoir les rattacher précisément à l’une ou l’autre phase, mais également un habitat situé à la fin du BVSG ou au début du Cerny, matérialisé par deux fosses, contenant du mobilier de nature domestique et cette fois-ci des bracelets en calcaire.

Outre l’habitat, une inhumation simple d’un adulte a été découverte dans le comblement supérieur d’une fosse en fente. Le défunt devait être allongé et il était accompagné d’un récipient en céramique. Une datation directe sur os la rattache à la phase d’occupation la plus ancienne sur le site.

Les témoins d’occupations ultérieures
Les vestiges mis en évidence sur les trois autres secteurs de fouille sont nettement plus dispersés, limitant les interprétations spatiales. Les structures excavées mises au jour excèdent rarement 0,10 m pour les trous de poteau et 0,20 m pour les fosses. De plus elles ne livrent qu’une faible part de mobilier, dont les éléments typologiques sont rares.

Le Néolithique moyen II (Chasséen septentrional ?) est illustré par une série de trous de poteau formant le plan incomplet d’un bâtiment à deux (?) nefs, installé en secteur 4, sur la berge haute de l’Esches. Des structures de combustion et de rejets étaient installées à proximité et pourraient faire partie de cette installation. Toutefois les dates radiocarbones s’étalent entre 4300 et 3800 avant notre ère, soit toute la période et concernent aussi bien des trous de poteau, que des structures de combustion et des fosses en fente.

La fin du Néolithique est représentée par du mobilier en nappe relativement concentré dans le secteur 5 (le plus éloigné du cours actuel de l’Esches), un trou de poteau dans ce même secteur et au moins deux fosses à profil en Y (ou Schlitzgruben), en activité au début du 3e millénaire (sur les secteurs 2D et 4). Trente-huit de ces fosses ont été enregistrées lors de la fouille, rattachables apparemment à plusieurs périodes du Néolithique (cf. ci-dessus). Les difficultés à les dater et à statuer sur leur fonction rendent délicat leur groupement. À titre d’hypothèse plusieurs de ces fosses en fente pourraient faire partie d’un système cynégétique de piégeage de gibier, installé le long des berges de l’Esches, à un endroit d’accès à l’eau ?

Une datation du Bronze ancien témoigne d’une présence sans vraiment pouvoir la quantifier et la qualifier. Comme celle-ci provient d’une fosse en fente, elle tend à montrer la perduration d’un système cynégétique sur le site. Elle est peut-être en relation avec le probable habitat du Bronze ancien mis au jour à 600 mètres à l’ouest en 2018 (Touquet Laporte-Cassagne 2018).

Une partie d’un enclos quadrangulaire à double fossé, sur le secteur 4, témoigne d’une implantation à caractère domestique au cours de la période laténienne. Sa morphologie et les quelques tessons de céramique prélevés durant le diagnostic sont les seuls éléments datants et permettent de le rattacher à La Tène finale (LTD). Certains tracés linéaires en partie relevés sur l’emprise pourraient procéder de la même organisation spatiale.

Par ailleurs, on recense en secteur 3 quelques structures attribuables à la période médiévale et consistant en un petit nombre de fosses et ce qui pourrait être un bâtiment à module central de plan quadrangulaire, sur quatre poteaux porteurs, de 5 m de côté.

Enfin quelques tracés linéaires apparaissant sur le cadastre napoléonien sont à rapporter à la période moderne et à l’implantation du parcellaire et des limites cadastrales du XIXe siècle, et l’on compte également une tranchée à traverses de la Première Guerre Mondiale.

Phase 2 – 2019 – secteurs 2A et 6

L’emprise prescrite est localisée sur la commune de Persan, au lieu-dit du Chemin Herbu, à la limite des communes de Persan (Val-d’Oise) et Chambly (Oise). Elle se situe en bordure de l’Esches, une rivière prenant sa source dans le département de l’Oise, le terrain présentant une conformation en pente douce en direction du cours d’eau.

La fouille des secteurs 2a et 6 de la ZAC du Chemin Herbu a fait l’objet d’une collaboration entre les sociétés Paléotime et Eveha, motivée par les problématiques scientifiques soulevées par le diagnostic archéologique, et notamment le recours à une expertise anthropologique pour la bonne conduite de la fouille des structures funéraires protohistoriques du secteur 6 (Alligri et al. 2017). Cette opération a été financée par la SEMAVO (Société d’Economie Mixte d’Aménagement du Val-d’Oise, maitrise d’ouvrage) dans le cadre de l’aménagement de la ZAC. L’emprise de fouille a concerné une surface de 6300 m². L’opération s’est déroulée du 3/06/19 au 11/10/19.

Secteur 6
Le décapage mécanique a débuté par le secteur 6, révélant une vingtaine d’inhumations et crémations organisées en noyaux, une enceinte funéraire, des fossés et quelques fosses. La fouille manuelle de ces structures a révélé un mobilier funéraire céramique et des parures (bronze, fer, pâte de verre) évoquant la transition entre Premier et Second Âge du Fer. L’espace funéraire ainsi exploré constitue probablement une extension de la nécropole de Chambly reconnue en 1999 en rive droite de l’Esches sous l’actuelle ZAC des Portes de l’Oise (Derbois-Delattre 1999). Une partie des fossés pourrait correspondre à une occupation antique (parcellaire ?).

Secteur 2a
Sur le secteur 2a, c’est une riche nappe de mobilier lithique, concentrée sur plusieurs centaines de m², qui a été découverte au décapage mécanique. Une fouille manuelle a été effectuée sur plusieurs fenêtres et transects. C’est une surface de 81 m² explorée sur 30 à 40 cm d’épaisseur qui a été fouillée par décapages planimétriques successifs, les abords étant ensuite prudemment décapés dans un second temps à la pelle mécanique. La série lithique collectée est conséquente : 40 000 pièces, décapages manuels, mécaniques et refus des tests de tamisage à l’eau compris. En cours d’étude, elle documente majoritairement une présence humaine en bord de l’Esches au Mésolithique ancien, une partie des objets suggère néanmoins l’existence d’une occupation plus ancienne, possiblement Belloisienne.

Ces indices d’occupations humaines s’insèrent dans une séquence stratigraphique de fond de vallée de plusieurs mètres d’épaisseur, enregistrant les variations des berges de l’Esches durant tout l’Holocène, notamment au travers d’épais niveaux tufeux conservant des paléosols enrichis en matières organiques. La transition Tardiglaciaire/Holocène est également documentée en bas de séquence. Le potentiel paléo-environnemental de la séquence stratigraphique, enregistrée sur toute la longueur de l’emprise de fouille, est donc important.

Bibliographie :
Alligri et al. 2017 : ALLIGRI (A.) dir., BLASER (R.), BROUX (G.), COURTEAUX (R.), DJEMA (H.), GOSLAR (T.), GOSSELIN (F.), GRANAI (S.), HAMON (C.), LEDUC (C.), LE JEUNE (Y.), MONCHABLON (C.), PARIAT (J.-G.), RODRIGUEZ (P.), SOUFFI (B.), TOUQUET LAPORTE-CASSAGNE (C.), VARTANIAN (E.) – Persan. ZAC du Chemin Herbu. Rapport de diagnostic archéologique préventif, avril 2017. Saint-Ouen-l’Aumône, SDAVO, 2017, 2 vol., 338 et 403 p.

Derbois-Delattre 1999 : DERBOIS-DELATTRE (M.) – Chambly « La Remise Ronde », ZAC des Portes de l’Oise, Rapport de sondages, 1999, SRA Picardie.

INTERVENANTS :

Aménageur : SEMAVO
Prescripteur : DRAC – SRA Île-de-France
Opérateur : Paléotime



AMÉNAGEMENT :

ZAC



LOCALISATION :

 



RAPPORT FINAL D’OPÉRATION :

Référence bibliographique :
– Rapport Phase 1 :
FÉNÉON L. (dir.), AJAS A., FERNANDES P., HAUZEUR A., LARUE M., LETHROSNE H., LIOTTIER L., MARQUEBIELLE B., RECCHIA-QUINIOU J., RENAUD A., TERROM J. (2021) – Persan (95), « ZAC du Chemin Herbu » : du Néolithique à l’époque contemporaine, Rapport Final d’Opération, Paléotime SARL, Villard-de-Lans (38), 2 vol., 926 p.

 
← Retour à la liste des fouilles préventives